Sur le boycott et la normalisation
(janvier 2011-avril 2012)
1.- Le contexte et les intervenants
1. La stratégie du sionisme masqué et la naïveté de ses victimes
En mars 2009, juste après l’agression barbare contre Gaza, un imam bruxellois bien connu participe, en compagnie d’un rabin de France, à un voyage à Sderot puis à Gaza. Le voyage est organisé en collaboration avec le Conseil Représentatif des Institutions juives de France (CRIF). Pour rappel, c’est de Sderot et sa région que sont issus des dizaines de milliers de réfugiés de Gaza. En décembre 2011, après la tuerie de Liège, le Collectif Musulmans Progressistes cosigne un communiqué avec le Foyer Culturel Juif de Liège et le Collectif Dialogue et Partage. Début février 2012, le Centre Culturel Arabe en Pays de Liège et un sénateur du Parti socialiste s’associent avec le Foyer Culturel Juif de Liège pour organiser une soirée débat sur le thème de « l’écoute de l’autre ». Début mars 2012, à l’occasion de la venue de Dieudonné à Herstal, le Collectif Musulmans Progressistes et l’association El-Kalima cosignent une lettre ouverte avec le Collectif Dialogue et Partage intitulée « Fauteurs de haine ». Depuis plusieurs années
déjà, de nombreuses associations sont membres adhérents du Réseau Anna Lindh.
Voici le problème que cela pose : le CRIF, le Foyer Culturel Juif de Liège, le Collectif Dialogue et Partage et le Réseau Anna Lindh sont toutes des organisations qui se tiennent sur des positions sionistes plus ou moins « pures et dures ». Il suffit d’aller sur leurs sites internet pour s’en convaincre. Pire : la cascade des liens du site du Réseau Anna Lindh (dont le président n’est autre qu’André Azoulay, ancien conseiller de Hassan II) mène tout droit aux associations « israéliennes » membres du réseau et même à des sites guerriers des colons de Cisjordanie.
La collaboration de toutes ses associations avec des associations « immigrées » n’est pas le fruit du hasard. Elle s’inscrit dans les nouvelles stratégies, mûrement réfléchies, du mouvement sioniste. Elle vise à obtenir, au niveau des associations, ce qui a déjà été obtenu au niveau des Etats arabes par le biais du Partenariat Euro-méditerranéen : une normalisation plus ou moins explicite, une reconnaissance de fait de l’entité sioniste. Et elles y parviennent par un argumentaire simple, bien rôdé mais qui masque leur orientation de base. Elles ne parlent en effet que d’écoute de « l’autre », d’éducation à la paix, de refus de l’importation des conflits internationaux, de dialogue interreligieux ou interculturel et autres formes de camouflage.
Que cette stratégie cible de préférence les associations musulmanes n’est pas non plus le fruit du hasard. Ces associations ont joué et jouent un rôle très important dans les mobilisations de soutien à la résistance du peuple palestinien et dans le développement du boycott de l’entité sioniste – l’une et l’autre ayant contribué à un isolement de plus en plus grand de cette entité et à sa perte graduelle de légitimité. Le but de la stratégie des organisations sionistes ici est de contrer cette dynamique en réduisant un problème éminemment politique à un « conflit culturel et religieux » et, ce faisant, de masquer les conséquences destructrices du projet sioniste sur le peuple palestinien : racisme d’Etat et discriminations pour les « Arabes israéliens », occupation militaire, spoliation des terres et apartheid en Cisjordanie, blocus meurtrier à Gaza et maintien forcé en exil des réfugiés partout ailleurs.
Tout cela doit cesser. Le prétendu appel au « dialogue » est une arnaque et les associations naïves doivent se réveiller au plus vite : on les manipule ! En Palestine, il y a une terrible oppression, une terrible injustice. Et ici en Belgique, nous avons un devoir de solidarité avec les opprimés – solidarité que les organisations pro-sionistes tentent de briser. Ici en Belgique aussi, nos prises de positions sur des questions de société qui nous interpellent sont bien sûr les bienvenues, mais elles doivent se faire de façon autonome, en choisissant ses amis loin des manipulateurs sionistes.
2. Qu’est-ce que la normalisation, « at-tatbi’ » ?
1. L’Etat sioniste « Israël » est un Etat d’apartheid et ne peut exister autrement. Comme tel, il doit être démantelé et remplacé par un Etat démocratique indépendant incluant tous les habitants de la Palestine (dont les réfugiés). Pour atteindre cet objectif, la lutte des concernés est l’élément principal. Mais la solidarité extérieure a aussi un rôle à jouer. Un des aspects importants de cette solidarité est le boycott de l’Etat sioniste. Et plus le boycott sera général et soutenu, plus il sera efficace comme l’a montré l’expérience de l’Afrique du Sud.
2. La normalisation est toute parole ou acte qui impliquent une reconnaissance officielle ou officieuse de l’Etat sioniste et qui, de ce fait, portent atteinte au boycott comme méthode de lutte et de solidarité avec le peuple palestinien.
3. La normalisation peut se manifester dans tous les domaines : diplomatique (échange d’ambassadeurs), politique (contacts avec des institutions, partis ou organisations sionistes), économique (échanges commerciaux, associations d’entreprises ou de banques), militaire (formation, coopération, manœuvres communes…) ou culturel (échanges universitaires, techniques, artistiques, sportifs…). Exemples : Egypte, Jordanie, Turquie.
4. La normalisation peut être directe ou indirecte. Elle est directe par exemple quand il y a échange d’ambassadeurs ou de représentants diplomatiques de rang inférieur. Elle est indirecte par exemple dans la participation à une foire internationale du livre où il y a un stand officiel de l’Etat sioniste ou dans la participation à un festival de cinéma où sont projetés des films représentant officiellement l’Etat sioniste. La normalisation indirecte peut aller très loin et avoir presque tous les ingrédients d’une reconnaissance directe. Il n’y manque que les signes extérieurs de l’échange d’ambassadeurs. Exemples : Maroc, Qatar.
5. Le cas du peuple palestinien. Les actes et les paroles de l’Autorité Palestinienne répondent à la définition de la normalisation telle qu’elle a été définie plus haut : c’est une normalisation directe choisie (= capitulation et collaboration). Inversement, les actes d’un commerçant de Cisjordanie ou de Gaza qui achètent des aliments à une entreprise israélienne ne répondent pas à la définition : le peuple palestinien est sous
occupation et blocus et n’a pas le choix : c’est une normalisation indirecte sous la contrainte.
6. Le cas des associations « israéliennes ». Dans les relations avec les associations israéliennes qui soutiennent la résistance du peuple, il faut distinguer deux situations. La première est la collaboration pour une activité commune concrète, comme la lutte contre la création de nouvelles colonies, les destructions des maisons ou les expropriations dues au « Mur ». Ici le contact doit être non seulement accepté mais recherché : c’est une coopération de lutte. La seconde situation est celle d’institutions ou d’activités associatives dans lesquelles des personnes sont présentes comme représentantes de « l’Etat d’Israël ». C’est le cas par ex. lors des réunions du Réseau euro-méditerranéen pour le
droits de l’homme. Ici le contact est à rejeter : il implique une forme de normalisation qui affaiblit le boycott.
7. Le cas des associations, partis ou institutions belges. Le problème se pose quand, pour une activité sans rapport avec la question palestinienne, on est amené à avoir des partenariats avec des associations ou institutions qui ont des rapports « normalisés » avec l’Etat sioniste. Dans ce cas, on n’en tient pas compte. Exemple : une activité sur la Tunisie en partenariat avec une association satellite du Parti socialiste par exemple (qui, lui, a des rapports normalisés) est acceptable. Pour les activités de solidarité et de lutte avec le peuple palestinien en Belgique, la condition préalable à toute collaboration pour une activité concrète est le soutien au boycott et au droit au retour des réfugiés.
8. Le cas des institutions internationales. Toutes les institutions dans lesquelles se trouvent représentés l’Etat sioniste doivent être boycottées. C’est un choix à faire. Mais il y a une exception à cette règle : l’Organisation des Nations Unis et ses institutions. Celle-ci, on le sait, a de nombreux défauts, notamment le fait que les décisions de l’Assemblée générale ne sont pas contraignantes et que les membres permanents du Conseil de sécurité sont majoritairement des membres de l’OTAN. Mais elle reste néanmoins la seule institution de la planète où tous les pays sont représentés. Dans ce cas, l’ancienne attitude qui consiste à quitter les lieux quand le représentant de l’Etat sioniste prend la parole reste valable.
3. Collectif Dialogue et Partage (CD&P)
Septembre 2000 : c’est le début de la seconde Intifada en Palestine et de sa répression brutale par l’armée et la police sionistes. Avec quelques moments-clés du point de vue médiatique : l’assassinat en direct du jeune Ad-Dourra, l’assassinat du dirigeant du FPLP Abou Ali Moustafa, le nettoyage barbare du camp de réfugiés de Balata et les images de soldats sionistes brisant les mains de jeunes lanceurs de pierres.
De ce point de vue, la seconde Intifada a constitué un tournant irréversible en Belgique. Elle a braqué contre l’Etat sioniste une partie non négligeable de l’opinion publique, ce qui s’est reflété dans les médias qui ne pouvaient plus cacher certains faits sans manquer de façon grave à la déontologie journalistique. Mais un autre aspect du tournant est bien plus important. Il s’agit de la naissance d’un mouvement de solidarité de masse avec le peuple palestinien : création d’associations, manifestations rassemblant de façon inédite des personnes par milliers, rassemblements de solidarité hebdomadaires (devant la Bourse à Bruxelles, Place du marché à Liège…). Fait significatif : la participation souvent décisive des jeunes issus de l’immigration arrivés à l’âge adulte.
La réaction à ces deux éléments (dégradation de l’image de l’Etat sioniste dans les médias et apport décisif des jeunes de culture musulmane au mouvement de solidarité) est à l’origine de la fondation du CD&P en 2002. Objectif : contrer l’une et l’autre. Avec la mise en œuvre de deux méthodes différentes :
- Faire du lobbying auprès des médias et des institutions. Concernant les médias, ont été notamment visés : La Libre, Le Soir, Le Vif, Le Soir Magazine, Standaard, Knack, RTL, RTBF. Ces médias ont été invités par le Collectif à des réunions en petit comité avec pour but de les amener, par des échanges sur le « Conflit du Moyen-Orient », à « moins de parti pris pro-palestinien », à une « approche plus nuancée », etc... Un exemple concernant le lobbying auprès des institutions. On se souvient que la Cour internationale de La Haye avait émis un avis déclarant illégale la construction du « mur de séparation » (juillet 2004). L’année suivante, Oxfam, en collaboration avec diverses associations, a planifié d’organiser une « Semaine contre le mur » à l’Université Catholique de Louvain-la-neuve (UCL), avec des intervenants du mouvement de solidarité avec le peuple palestinien. Averti, le CD&P a fait du Lobbying intensif pour obtenir qu’il y ait aussi des intervenants « pro-israéliens ».
- Désorienter et diviser les associations solidaires issues de l’immigration. La méthode ici est différente. Plus question d’échanges sur le « Conflit du Moyen-Orient » : les personnes ciblées en connaissent souvent trop pour qu’on puisse les tromper longtemps. Comme on peut le lire sur la plateforme du CD&P (www.dialogue-partage.org), il s’agit plutôt de « contribuer à la construction de la paix et d’œuvrer au dialogue entre les individus, groupes, communautés, peuples et nations » et de favoriser « toute initiative de rapprochements entre les personnes issues des diverses communautés religieuses, philosophiques, culturelles ou ethniques » de la Belgique. A l’égard de la réalité en Palestine, il y a une opposition radicale entre deux attitudes fondamentales : d’un côté, soutien aveugle au racisme d’Etat, à l’occupation et au maintien forcé en exil ; et de l’autre, solidarité avec la résistance des discriminés, des occupés et des exilés. A cette opposition, le CD&P substitue subrepticement des « tensions intercommunautaires ou religieuses » qui peuvent être résolus par le dialogue en Belgique. C’est cela le piège et un certain nombre d’associations et de personnes s’y sont laissés prendre.
4. La Fondation Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures
Ce qu’on appelle Le partenariat euro-méditérranéen (Euromed) a été conçu dès le départ (1995) avec deux objectifs. Le premier consiste à diviser le monde arabe. En effet, alors que tous les pays de l’Europe et notamment de l’Union européenne y sont représentés, seuls sont représentés les pays du Monde arabe qui ont une façade sur la Méditerranée. Le deuxième objectif de l’Euromed consiste à offrir un cadre de normalisation indirecte (tous les échanges sauf la diplomatie) de certains pays du Monde arabe avec L’Etat sioniste. Ce cadre concerne principalement le domaine économique en conditionnant toute « coopération » dans ce domaine avec l’Europe à une « coopération » de même nature des pays méditerranéens du Monde arabe avec l’Etat sioniste. La Fondation Anna Lindh est un outil complémentaire poursuivant les mêmes objectifs, mais dans le domaine culturel.
a) Vue d’ensemble de la Fondation
Elle a été créée en 2005 et la manière dont elle fonctionne est révélatrice de sa nature. Elle est cofinancée par l’Union européenne (7 millions d’euros) et les pays membres de l’Union européenne (6 millions). Elle est dirigée par un Conseil des gouverneurs composés des représentants de ses 43 pays membres (ambassadeurs, hauts fonctionnaires, etc…). Ce Conseil désigne le président de la Fondation (actuellement c’est André Azoulay du Maroc), un Directeur et les membres du Conseil consultatif qui est supposé être composé des « principaux spécialistes euro-méditerranéen du dialogue interculturel » (voir site). C’est le gouvernement de chaque pays membre de la Fondation qui désigne un coordinateur chargé de développer le réseau local dans son propre pays. La Fondation regroupe ainsi plus de 3000 organisations de la société civile dans l’ensemble des 43 pays membres.
Le Conseil consultatif est composé de 18 membres : 9 européens et 9 non européens. Celui de 2008 était présidé par André Azoulay et se compose ainsi côté Monde arabe : Aicha Kassoul (Algérie), Nevine Simaika Halim (Egypte), Ron Barkai (Israël), Rowaida Al-Ma’aitah (Jordanie), Antoine Nasri Messara (Liban), Taleb Mahmoud Omran (Syrie), Mohamed Mahjoub (Tunisie). Le Conseil a été renouvelé en juin 2012. Il est toujours présidé par André Azoulay et se compose ainsi côté Monde arabe : Sabria Boukadoum (Algérie), Nevine Simaika Halim (Egypte), Yaarah Bar-On (Israël), Rowaida Al-Ma’aitah (Jordanie), Antoine Nasri Messara (Liban), Mohamed Kamelelddine Gaha (Tunisie).
La composition du Conseil appelle plusieurs remarques. La première : André Azoulay est un ancien conseiller du dictateur Hassan II et actuel conseiller du fils de ce dernier et il a toujours été une sorte d’ambassadeur d’Israël au Maroc et d’ambassadeur du Maroc en Israël (il serait instructif de connaître les voies ténébreuses du lobbying qui ont permis qu’un « type pareil » se retrouve président de la Fondation) ; Le Maroc ne figurait pas dans le Conseil de 2008, mais il figure dans celui de 2012, alors que la Syrie ne figure plus dans le nouveau Conseil ; La Jordanie figure aussi bien dans l’ancien Conseil que dans le nouveau alors qu’elle n’a pas de façade méditerranéenne. Il est donc possible de dire qu’« on s’est arrangé » pour que tous les pays méditerranéens du Monde arabe et « Israël » figurent toujours dans le Conseil. Bel exemple de normalisation indirecte.
Deuxième remarque : La France est représentée au Conseil par Caroline Fourest dont on connaît les positions islamophobes, pro-sionistes et pro-hégémonie occidentale. Elle a écrit de nombreux livres et des centaines d’articles. C’est en vain qu’on y cherchera la moindre condamnation du caractère discriminatoire de l’Etat sioniste, de l’occupation, du déni des droits des réfugiés. En revanche, elle ne se prive pas de marteler partout que « l’Etat d’Israël a été créé pour abriter les survivants des camps de la morts ». Du point de vue historique, cette affirmation est largement inexacte : le projet sioniste est très antérieur à la guerre, la majorité des habitants n’étaient pas des survivants et tous les survivants ne sont allés en « Israël ». Mais le plus grave est que cette affirmation se refuse à dire aux dépens de qui s’est faite cette « création ».
Autre exemple : Caroline Fourest a écrit un livre sur les intégrismes religieux. Elle commence par y faire semblant de s’en prendre à tous, mais finit par conclure (c’est à cela qu’elle voulait en venir) « que si l’islam n’a pas le monopole de la violence, il est le seul à bénéficier d’un stock de bombes humaines ». Comme on le voit, un : ce n’est plus d’intégrismes qu’il s’agit mais de « l’islam » tout court. Deux : pas un mot sur ceux qui ont un stock de bombes atomiques. Ce sont des amis de l’Occident et ils ont donc le droit et le devoir d’en avoir afin d’aider à tenir en respect ceux qui perturbent les marchés et les sources de matières premières et d’énergie. Résultat : tout le caractère aussi creux que trompeur du « dialogue des cultures » de la Fondation apparaît au grand jour avec la présence de Caroline Fourest dans son Conseil.
Dernière remarque : il n’y a pas de représentant de la Palestine dans le Conseil, mais il y a des associations palestiniennes dans le réseau. A ce propos, lors de l’agression barbare de l’armée sioniste contre la bande de Gaza fin 2008-début 2009, la Fondation a publié une déclaration. Elle y exprime « son inquiétude face aux événements », elle déplore la mort de « nombreux civils » palestiniens, elle « déplore aussi la mort de civils israéliens atteints par les obus lancés depuis le territoire de Gaza ». Comme on le voit, seul les « obus » sont signalés. Pas un mot en revanche sur l’utilisation du phosphore blanc, sur l’expérimentation d’armes nouvelles (DIME) ou sur le bombardement de zones densément peuplées (crime de guerre) et bien sûr, rien sur le blocus et sur les réfugiés de Gaza. Il n’est donc pas étonnant que la déclaration en conclue qu’il ne lui « appartient pas de se prononcer sur les responsabilités politiques qui ont conduit à cette situation », qu’elle « partage la légitimité du souci de sécurité des citoyens israéliens, mais elle revendique que ce souci trouve une réponse politique ». La Fondation entend par là le processus d’Oslo dont toute personne de bon sens peut voir à quoi il a servi : transformer une partie de l’élite palestinienne en collaborateurs et bénéficiaires de l’occupation, transformer une partie des résistants en police (entrainée par les Américains s’il vous plait !) et en armée de supplétifs chargée de mater les occupés qui ne veulent pas être occupés. Et voici maintenant le plus piquant : quand on clique sur le lien du site de la Fondation qui renvoie au texte intégral de la déclaration, on se retrouve sur le blog de Caroline Fourest. La boucle est bouclée.
b) Le réseau en « Israël »
Le réseau de la Fondation est représenté en « Israël » par l’Institut Van Leer de Jérusalem. Cet Institut a été fondé en 1959 avec pour base, lit-on sur le site, « la vision d’Israël comme pays d’attache pour le peuple juif ». Si vous ajoutez à cela que, dans sa présentation, le réseau a exclu de son vocabulaire les mots « discriminations », « réfugiés » et « occupation », vous avez alors ce qui est la définition même du sionisme. L’emballage qui parle de « transformation sociale du conflit interculturel Israël-Palestine » n’est justement qu’un emballage pour la normalisation.
Dans le Conseil Consultatif de 2012, c’est Yaarah Bar-On qui représente le réseau de l’Etat sioniste dans le Conseil consultatif. Dans celui de 2008, c’était Ron Barkai. Celui-ci est maintenant représentant de l’Etat sioniste dans le Conseil des gouverneurs de la Fondation. Il s’est fait connaître en 2008 lors du Salon du livre de Paris dans lequel l’Etat sioniste avait un stand officiel. A cette occasion, de nombreux éditeurs et écrivains du Monde arabe avaient décidé de boycotter le Salon et Ron Barkai s’en est pris à eux de façon virulente. Il a dit : « J’étais déjà contre le boycott des universités israéliennes, je trouvais que c’était une grosse connerie. Celui-ci [boycott du Salon du Livre] en est une autre ».
c) Le réseau en Belgique
Le réseau belge de la Fondation Anna Lindh est coordonné par la Fondation Roi Baudouin. C’est le Ministère belge des affaires étrangères qui a désigné la FRB pour cette coordination. Mais le plus important pour nous ici est de signaler que des associations qui soutiennent la révolution tunisienne se sont laissé piéger en adhérant sans réfléchir au réseau. Malgré les efforts de certaines pour s’en retirer (multiples courriers), elles sont toujours répertoriées comme associations membres du réseau.
d) Le réseau au Maghreb-Machrek : cas tunisien :
Il n’y a pas moyen de savoir quelles sont les associations tunisiennes qui sont membres du réseau de la fondation. En effet, quand on clique sur le lien qui renvoie au réseau tunisien, on tombe toujours sur… un site commercial. Quelques indices et interrogations : 1°) Qui a nommé l’actuel membre tunisien du conseil des gouverneurs ? Il y siège auprès du représentant de l’Etat sioniste. 2°) Qui a désigné l’actuel membre tunisien du Conseil consultatif ? Il y siège auprès du représentant de l’Etat sioniste. 3°) Qui a désigné l’actuel coordinateur du réseau tunisien de la Fondation ? 4°) Le 7-9 juin 2012, la Tunisie a abrité le Troisième Congrès de Dialogue Sud Nord Méditerranée pour une Vision Commune du Futur : La société civile et les pouvoirs publics : quels partenariats ? Cette initiative a été sponsorisée, entre autres, par la Fondation Anna Lindh. « Les Autorités tunisiennes » qui ont accepté cela, ou elles ne savaient pas et alors elles sont incompétentes, ou elles savaient et il faut alors se poser d’autres questions et tirer d’autres conclusions.
5. Ce qui se passe sur le terrain Pendant qu’on nous parle de « dialogue des cultures »
Al-Quds al-Arabi, journal arabophone basé à Londres, a publié début janvier 2012 un article saisissant basé sur les rapports de diverses associations des Droits de l’Homme qui a établi une liste très complète des violations des lieux et de la liberté de culte en Palestine. Les rapports ont relevé plus de 23 violations au cours de l’année 2011. Celles-ci prennent des formes diverses : faire irruption de façon violente dans les mosquées pour en saccager le contenu, empêcher les fidèles d’y accéder, y opérer des arrestations en pleine prière, y mettre le feu, écrire sur leurs murs des slogans racistes, transformer certaines mosquées en sites archéologiques, etc… Voici les faits relevés :
Le 19/03/2011, les forces d’occupation ont fait irruption dans la mosquée Abou Bakr à Houssane près de Ramallah et rudoyé les fidèles.
Le 18/04/2011, à al-Khalil, L’armée d’occupation a interdit l’accès à la mosquée d’Ibrahim pendant deux jours, sous prétexte du « début des fêtes juives ».
Le 03/05/2011, des dizaines de colons juifs ont mis le feu à une salle de prière de l’école de Hawara au sud de Naplouse.
Le 05/05/2011, l’armée d’occupation a pris d’assaut la mosquée Ibn Qadama dans le quartier de Wadi al-Jawz à Jérusalem. Elle a arrêté deux personnes. Il a fait la même chose deux semaines plus tard. Lors de l’opération, ils ont brisé les portes de la mosquée et confisqué les amplificateurs.
Le 07/06/2011, des groupes d’extrémistes juifs ont provoqué un incendie dans la mosquée al-Maghir au nord de Ramallah, occasionnant des dégâts très importants.
Le 14/06/2011, l’armée d’occupation a émis l’ordre militaire de destruction de la mosquée al-Ma’asara, sous prétexte qu’elle a été construite sans autorisation.
Le 21/06/2011, des groupes extrémistes juifs ont appelé à détruire la mosquée du quartier Ras al-Amoud à Jérusalem.
Le 07/07/2011, la police d’occupation a interdit l’accès à la mosquée Ibn Qadama dans le quartier de Wadi al-Jawz à Jérusalem.
Le 09/08/2011, à al-Khalil/Hébron, l’armée d’occupation a installé un poste de contrôle à l’entrée de la mosquée d’Ibrahim.
Le 21/08/2011, pendant le ramadan, l’armée d’occupation a empêché de sortir tous les fidèles qui se trouvaient en prière dans la mosquée d’al-Aqsa, sous prétexte de chercher un Palestinien qui a agressé au couteau un officier
israélien.
Le 05/09/2011, des colons juifs extrémistes ont mis le feu à la mosquée al-Nourayn dans l’arrondissement de Naplouse, après avoir brisé les fenêtres, saccagé objets et ameublement et écrit des slogans anti-arabes sur les murs.
Le 08/09/2011, un groupe de colons juifs extrémistes a écrit des slogans haineux contres les Musulmans et les Arabes sur les murs de la mosquée Yatma au sud de Naplouse.
Le 09/09/2011, un groupe de colons juifs sont violemment entrés dans l’agglomération de Bir Zayt. Ils ont écrit des slogans haineux contre l’Islam et son prophète.
Le 03/10/2011, des extrémistes juifs ont mis le feu à la mosquée al-Nour dans le village Toba-Zangharia en Galilée (dans les territoires palestiniens occupés en 1948). Ils sont aussi écrits sur les murs des slogans racistes et des menaces.
Le 21/112011, un extrémiste juif a fait irruption dans la mosquée Hassan Bak de la ville de Yafa/Jaffa (dans les territoires palestiniens occupés en 1948), perturbant la prière.
Le 25/11/2011, l’armée d’occupation a détruit une partie de la mosquée de l’agglomération de Yata près d’al-Khalil/Hébron : plus de 50 mètres carrés, dont une petite pièce annexe qui servait d’abri au générateur électrique de la mosquée.
Le 07/12/2011, un groupe de colons juifs a incendié le portail de la mosquée Ali Ibn Abou Talib dans le village de Barouqyan.
Le 14/12/2011, un groupe de colons juifs a mis le feu à la mosquée de Oukacha à Jérusalem ouest, causant des dégâts importants.
Le 15/12/2011, un groupe de colons juifs a mis le feu à la mosquée al-Nour dans le village de Barqah près de Ramallah. Il a aussi écrit sur les murs des slogans anti-arabes et anti-musulmans.
Le 19/12/2011, un groupe de colons juifs a écrit des slogans hostiles aux Musulmans et aux Arabes sur les murs de la mosquée du village de Bani Na’im et y a fait d’importantes dégradations matérielles.
Le 27/12/2011, dans la ville de Bi’r as-Sab’, l’administration municipale a transformé la grande mosquée de la ville en musée juif. (Source : al-Quds al-Arabi (Londres), volume 23, Issue 7019, Tuesday 10 january 2012 ; consultable sur alquds.co.uk/archives)
2.- Un plan pour le boycott
1. La situation
L'entreprise sioniste de colonisation de la Palestine, conçue et entamée dès la fin du 19ème siècle, s'est poursuivie sous le mandat britannique après la première guerre mondiale. Elle a abouti à la création de « l'Etat d'Israël » en 1948. Cette entreprise, pensée par le sionisme politique comme « libératrice » pour les Juifs, a été pour les Palestiniens une entreprise de spoliation, de terreur et de mort. Elle a eu trois conséquences fondamentales : 1°) Des centaines de milliers de palestiniens ont été expulsés par la violence et la terreur et réduits à l'exil et à la vie dans les camps de réfugiés, 2°) Ceux qui sont restés dans ce qui est devenu « l'Etat d'Israël » ont été soumis à un régime d'apartheid, traités en citoyens de seconde zone, harcelés, discriminés. 3°) Ceux qui se sont retrouvés à Gaza et en Cisjordanie ont été soumis, à partir de juin 1967, à une occupation brutale, féroce.
Cette situation, imposée par la force au mépris de nombreuses résolutions de l'ONU, a été soutenue de façon conséquente par les puissances occidentales. Le peuple palestinien, lui, ne l'a jamais acceptée. Le demi-siècle qui a suivi est jalonné de luttes continuelles, courageuses, tenaces pour recouvrer ses droits : retour des réfugiés, démantèlement du régime d'apartheid et fin de l'occupation.
Cette longue résistance du peuple palestinien rencontre, ici en Europe, de plus en plus de sympathie, de solidarité. C'est pour participer à ce mouvement que la Plateforme de soutien au peuple palestinien a été mise en place. Rassemblant des associations et des individus, elle vise à :
- promouvoir toutes les formes de solidarité avec le peuple palestinien et de soutien à sa légitime résistance à l'oppression sioniste ;
- appeler les autorités belges à prendre parti pour le peuple palestinien opprimé, pour la justice, pour le droit international.
La situation créée par l’entreprise coloniale sioniste (expulsion et exil, discriminations, occupation et blocus), ce qu’on appelle Israël, ne peut pas exister sans le maintien de cette situation par la force. C’est l’Etat armé (et le désarmement de ses victimes) qui protège ce système qu’il faut boycotter. La distinction Israël / territoires palestiniens est une supercherie. Tout Israël est une colonie illégale.
C’est tout Israël qu’il faut boycotter.
2. L’appel au boycott
Nous appelons les personnes et les collectifs organisés à apporter tout le soutien possible au peuple palestinien. Un peuple auquel on a tout pris : sa terre, sa liberté, sa dignité ; un peuple auquel on veut de surcroît prendre les seules choses qui lui restent : le droit de résister au sort qui lui est fait, le droit de choisir librement ses représentants.
Nous appelons au soutien de sa légitime résistance à une oppression qui n’est maintenue que par la force et la violence. Cette oppression ne peut être brisée qu’avec le démantèlement du régime de discrimination raciste, la fin de l’occupation et le retour des tous les réfugiés sur leurs lieux d’origine — toutes revendications clairement appuyées par le Droit international.
Nous appelons à interpeler le gouvernement belge quant à son manque d’implication dans la mise en œuvre de ce Droit. Mais nous pouvons tous déjà — parce cela ne dépend que de nous — contribuer au soutien du peuple palestinien en boycottant les produits en provenance de l’Etat sioniste. Nous pouvons le faire chaque jour pour les produits les plus courants, dans les grandes surfaces comme dans les petits commerces.
Important : l'origine des produits est souvent escamotée pour contourner le boycott. Nous pouvons les identifier par le code-barre suivant : 7 290.
3. Quelques règles pour un Boycott efficace
Comme forme de solidarité avec le peuple palestinien, le boycott de l'Etat sioniste doit toucher tous les niveaux : économique, diplomatique, culturel (académique, sportif), etc. Le boycott économique ne dépend pas de longues démarches collectives auprès d'institutions nationales ou internationales, de gouvernements, de partis... Il a donc l'avantage d'être individuel et immédiat et quotidien. Sa mise en pratique a déjà commencé à produire des effets. Selon un sondage récent, 21% des exportateurs israéliens disent avoir subi un impact direct du boycott depuis le début de l'année 2009.
Règle 1 : commencer par le boycott économique.
Certaines franges du mouvement de solidarité pensent qu'il faut faire une distinction entre les « colonies illégales » et « l'Etat d'Israël » et appelle à boycotter uniquement les produits des colonies. C'est absurde ! L'Etat sioniste maintient par la force et la violence une partie des Palestiniens en exil (réfugiés) ; il soumet à la discrimination ceux qui sont restés sur place (« Arabes israéliens ») ; il soumet à la domination militaire coloniale tous les autres (Gaza-Cisjordanie). Les colonies ne sont qu'un aspect de l’oppression sioniste. C'est tout « l'Etat d'Israël » qui est une colonie illégale. Et il doit être boycotté comme tel. Point barre.
Règle 2 : boycotter tous les produits provenant de « l'Etat d'Israël ».
Les produits provenant de l'Etat sioniste sont normalement identifiables par le code barre 7 290. Mais cela ne suffit pas de le savoir. Sous la poussée du mouvement de boycott lui-même (ce qui est déjà un acquis), l'origine du produit est souvent escamotée : vente en vrac, emballage sous le code barre d'un autre pays, etc...
Règle 3 : dans le doute sur l'origine d'un produit, s'abstenir de l'acheter.
On trouve sur les sites ou sur les tracts des associations de solidarité des listes impressionnantes de produits à boycotter. Cela pourra se faire quand le boycott deviendra massif et institutionnel. Dans l’immédiat de telles listes sont tout simplement "ingérables" par un individu.
Règle 4 : se concentrer sur les distributeurs et les grandes marques
De nombreuses entreprises occidentales apportent une aide directe (dons) ou indirecte (collaborations, commandes...) au maintien et au renforcement de l'Etat sioniste. Les américaines sont plus actives que les européennes. Là aussi, il ne peut être question de les boycotter toutes.
Règle 5 : se concentrer sur quelques entreprises
Il s’agit des entreprises qui sont des symboles de l'hégémonie des Etats-Unis (Coca-Cola, MacDo, Disneyland, Marlboro, etc.) et d’entreprises que l'actualité met en avant (Dexia) –
4. Une lettre sur l’expérience du boycott à Liège
Bonjour Domi.,
J'espère que tu as reçu mon courrier du mardi 2. Pour les réunions de la Plateforme « Solidarité Belgique/Moyen-Orient » (tu as assisté à l'une d'elles), j'avais préparé aussi pour l'une des réunions suivantes un cadre de travail pour le Boycott. Il a été lu en réunion, mais n’a été ni discuté ni adopté. Je te l’envoie à toutes fins utiles, mais aussi parce que c'est à partir de ce cadre que nous (membres de l'Association Racines et Citoyenneté) avons mis sur pied un plan de travail concret.
Je suppose que tu as reçu le PV de notre dernière réunion de la « Plateforme » en question (23 juin). Pour le Boycott, il a été décidé de sensibiliser à la nécessité et à l'intérêt du boycott et de mobiliser pour le concrétiser : en alertant les radios « ethniques », en appelant les mosquées et autres associations et réseaux à relayer notre appel, en prenant contact avec les petits commerces « ethniques », etc. Comme tu peux le constater, il n'y rien ni sur Bierzet ni sur les grossistes. Pourquoi ?
- Pour les grossistes : ils sont les plus difficiles à convaincre parce qu'ils ont des intérêts matériels trop forts dans l'importation, mais si les acheteurs (plus faciles à convaincre) n'achètent pas les produits importés, les grossistes peuvent « danser sur leur tête ».
- Pour Bierzet : l'opération peut être médiatiquement intéressante, mais c'est à peu près tout. On peut très bien réussir de ce côté-là sans qu'il y ait un boycott réussi dans les faits. En outre, à mon avis, il faut éviter les activités qui nous isolent, qui ne nous rapprochent pas de la masse des gens sensibles à la question palestinienne.
J'en viens maintenant au plan de travail concret.
1°) campagne d'affichage de l'appel au Boycott (affiche A3 couleurs, et tract A4 en noir et blanc) : dans les mosquées, dans les Asbl-cafés, dans les petits commerces « ethniques » (pas seulement marchands de fruits et légumes mais aussi petite restauration). Pour la part de travail confié à l'Association Racines et citoyenneté, nous avons ciblé deux rues où il y a une forte concentration de toutes ces caractéristiques.
2°) campagne de contacts et explication : elle doit être menée de front avec la première. Il faut bien entendu, par exemple, rassurer chaque petit commerçant que le petit commerçant d'à côté boycottera aussi. Mais il faut surtout créer une dynamique où les gens (acheteurs comme vendeurs) se sentent acteurs et tisser des liens avec eux pour des activités de mobilisation et solidarité autres que le boycott. C'est un travail à moyen terme bien plus rentable que les « gesticulations » sans lendemain.
3°) créer un noyau de lutte bien organisé qui se charge des tâches, fait le bilan régulièrement, etc.
Nous avons déjà commencé un peu à mettre à exécution le plan, mais à titre d'essai, pour acquérir un peu d'expérience pour la suite. L'essentiel de la campagne, pensons-nous, devrait se faire à l'approche du ramadan, soit fin août-début septembre. Ce n'est évidemment pas l'idée que tu as de l'urgence. C'est un point sur lequel nous ne sommes pas d'accord. Nous sommes prêts à en discuter et attendons tes remarques.
Amitiés,
Tahar
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